Accueil
Droit
Réunion
Copyleft : Bernard CHAMPION

2 Éléments d'Ethnographie Malgache
Mots clés : Antemoro Sorabe Ancestralité Tanguin Choc des cultures
Développement
Champs : Ethnographie Histoire Anthropologie du développement Anthropologie de l'image

1 - Zafimahavita
sur le “choc des cultures”
2 - Les trois pierres du foyer
des clans et des clones dans la vallée de la Manañano
3 - Visages d'Ambila :
-
le diaporama (4') pour le Musée des Arts premiers (Quai Branly)
-
le livre : <www.ocean-editions.fr>
- le site : Ambila
4 - Zafimahavita : funérailles dans le Sud-est Malgache (film 40')
dossier pédagogique : l'ancestralité
5 - La Case, les Sorabe, L'Histoire
6 - Le Tanguin : mode d'emploi
7 - La parenté dans les contes
programme de recherche
8 - Riziculture traditionnelle et S.R.I.
9 - La fonction missionnaire :
sur la mission lazariste à Fort-Dauphin (1648-1674)
10 - Les Compagnies de commerce
et la première colonisation de Madagascar (1642-1674)

présentation générale du site

Une présentation raisonnée des pages WEB qui composent ce site
sous forme d’un ouvrage électronique téléchargeable
sur la page d'accueil
(2 Go, 1900 pages au format A4)
voir
SOMMAIRE


« Il faut respecter le Tanguin »
*
(Communication au colloque "Les plantes et l'effroi"
13,14,15 octobre 2011, Forcalquier)


Une présentation en diaporama


Un des romans les plus lus d'Émile Zola, La Curée, publié en 1872, met symboliquement en scène, dans la serre d'un jardin d'hiver (alors à la mode dans les hôtels particuliers), la plante tropicale que je présente ici : le Tanguin de Madagascar (que Zola orthographie, de manière étymologiquement juste, Tanghin). Une thèse de pharmacie présentée à Paris l'année qui suit la publication du roman de Zola porte pour titre : Recherches pour servir à l'histoire botanique, chimique et physiologique du Tanguin de Madagascar (Joannes Chatin, 1873, Paris, Arnous de Rivière). Cette connaissance du Tanguin, de sa symbolique et de son utilisation est relativement ancienne puisqu'une note publiée en 1822 dans le Journal de Pharmacie et des sciences accessoires (t. VIII, p. 90-93, Paris), signée Virey et intitulée : "Sur le Tanguin de Madagascar, fruit vénéneux, employé comme épreuve judiciaire" fait mention de ses propriétés et de sa fonction ordalique. "La Curée dit Zola lui-même, c'est la plante malsaine poussée sur le fumier impérial" (préface de la première édition). C'est en effet l'époque où l'on ouvre les entrailles de Paris pour construire les beaux quartiers du baron Haussmann et où, dans une odeur de fressure suggérée par l'image de la curée de la chasse à courre, affairisme et perversion participent de la même morbidité d'une société en décomposition.* Dans cet environnement social délétère, le Tanguin, qui mûrit ses poisons dans la chaleur du jardin d'hiver, concentre les clichés malsains – pour ce sédentaire qu'était Zola alors que l'Europe s'étend sur le monde – de l'exotisme et de la tropicalité. Dans La Curée, en effet, la "plante maudite" (l'"arbuste empoisonné") est associée à l'inceste.**


La Curée
("Il accueillit le coup d’État avec la joie chaude et bruyante d’un chien qui flaire la curée.")
La Fortune des Rougon (1870)
Émile Zola et le Paris d'Haussmann, préfet de la Seine en 1853
(les travaux de rénovation de la capitale dureront 17 années)

Si l'on va à la source, maintenant, sous les tropiques, donc, une étude pharmacologique, datée de 1982, signée d'un médecin malgache et publiée dans le Bulletin de l'Académie malgache, se conclut en ces termes : Tanghin : "un mot qui inspire jusqu'à présent une terreur rétrospective aux Malgaches qui n'ignorent pas l'histoire de leur pays" ("Contribution à l'étude de deux variétés cardiotoniques de Tanghin à Madagascar, Thanginia venenifera (Apocynacées), Menabea Venata (Asclépiadacées)", par le Dr Max-Olivier Andriananja, Bulletin de l'Académie Malgache, t. 60/1-2, 1982 (1986), p. 116). En terre tropicale ou en Europe, on est bien dans ce monde d'effroi associé au végétal qui nous réunit…

Qu'est-ce donc qui justifie la réputation du Tanguin ? Son caractère toxique, sans doute, dont je vais faire état, mais aussi, je vais le préciser après l'avoir mentionné, sa singulière fonction sociale.***

La célébrité du Tanguin tient d'abord à sa qualité de poison

Mathieu-Joseph-Bonaventure Orfila, auteur d'un Traité de toxicologie (1843) rapporte avoir reçu de l'Ile de France (Maurice) la lettre suivante : "Les noirs esclaves à Maurice parviennent facilement à se procurer du Tanguin par le moyen d'autres noirs de la même caste, employés comme matelots sur les navires qui font le voyage de cette colonie à Madagascar, et les exemples d'empoisonnement, tant à Maurice qu'à Bourbon, sont très fréquents. Jusqu'à présent, aucune personne à qui ce poison a été administré n'a échappé à son sort" (Mathieu-Joseph-Bonaventure Orfila, Traité de toxicologie, tome second, 4ième édition, Paris, 1843, p. 444).
Cette hantise de l'empoisonnement par les esclaves malgaches a en effet son répondant à l'île de La Réunion où le littoral est ponctué d'une ceinture de villes portant des noms de saints et où les lieux dits des Hauts (de la montagne) portent les noms de "diables malgaches". La chronique judiciaire de la fin du XIXe siècle fait état d'un cas d'empoisonnement d'un membre d'une famille de planteurs bien connue à La Réunion. Après avoir mentionné deux espèces de "tanghin du pays" appartenant à la famille des euphorbiacées le sapium lineatum Spreng. et le sapium obtusifolium Spreng. J. Le Clerc rapporte ceci dans un ouvrage publié en 1864 : "L'honorable M. Richard, directeur du Jardin botanique, me racontait dernièrement qu'à l'occasion d'un empoisonnement par le tanghin du pays, il reçut mission de la Cour d'assises de Saint-Denis de rechercher, et de produire aux débats la plante désignée sous ce nom. Il l'apporta au Jury, et l'accusé reconnut que c'était bien le végétal dont il s'était servi pour empoisonner son maître ; il lui en avait fait prendre dans ses aliments." (Des plantes médicinales de l'Île de la Réunion et de leur application à la thérapeutique, Saint-Denis, 1864, pp. 20-21.) On fait aussi état à La Réunion d'une liane utilisée pour empoisonner les chiens, dénommée "Mafate en bois" (pour : "Mafate [Mahafaty] amboa", soit en malgache, "qui tue le chien", amboa), parfois dénommée Tanguin. Cet arbuste lianescent est Cnestis glabra, de la famille des Connaracées (comprenant essentiellement des lianes tropicales). C'est l'écorce des racines qui paraît renfermer la plus grande toxicité. Le nom réunionnais est dû à l'utilisation de la plante pour empoisonner les chiens des chasseurs de marrons (esclaves réfugiés dans la montagne). On l'appelle aussi "liane rouge" et "bois à gratter". Elle contient un neurotoxique, la "glabrine" (1984) (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/6529589).


La flore de Jacob de Cordemoy, Flore de l’Ile de la Réunion, Paris, 1895, p. 344 mentionne :
Stillingia Garden.

(Vulg. Tanguin du pays, Bois de lait.) Arbuste à suc laiteux, très glabre. Feuilles lancéolées ou oblongues lancéolées, assez variables. Assez rare. Montagne Saint-Denis. Plante vénéneuse. Poison du cœur.


Aujourd'hui même à Madagascar, je l'ai rappelé, la mémoire du Tanguin est vivace et reste associée à la fois à la procédure judiciaire et à la sorcellerie. Je n'ai pas encore dit que le Tanguin faisait toujours partie de la pharmacopée malgache et qu'on pouvait s'en procurer assez facilement. (Il agit sur le cœur en tant que cardiotonique, sur le système nerveux, provoquant vomissement et visions colorées, et sur les reins, exerçant une action diurétique indirecte). L'échantillon que je présente ici vient du marché d'Antananarivo. L'herboriste qui me l'a fourni, après avoir marqué son étonnement de voir un vahaza s'intéresser à cette graine, m'a demandé si j'avais des problèmes avec la justice. Et d'expliquer que, lorsqu'on se présente devant un tribunal, il est conseillé de mettre une noix de Tanguin dans sa poche : l'on est sûr, alors, d'avoir gain de cause. Le Tanguin reste donc associé à la manifestation de la vérité, c'était sa fonction, je l'exposerai. On dit aussi que c'est un moyen de se protéger des sorciers. J'ai imprudemment fait état de cette dernière information à l'université de La Réunion, probablement lors d'une soutenance de thèse, et j'ai eu la visite, quelque temps après, de plusieurs personnes : – Pourriez-vous nous rapporter du Tanguin de Madagascar ? On verra que c'était aussi, traditionnellement, la principale fonction du Tanguin : démasquer les sorciers. J'ai donc marchandé quelques noix au marché d'Antananarivo et, après quelque discussion, la "tisaneuse" (comme on dit à La Réunion) m'a convaincu qu'il ne lui était pas possible de descendre plus bas : car : "il faut respecter le Tanguin"…

Hooker, W.J., Botanical miscellany, vol. 3: t. 110 (1833) [Prof. W. Bojer]


www.meemelink.com


www.illustratedgarden.org

Le tanguin dans son environnement

Le Tanguin pousse en climat sub-équatorial et on le trouve sur la côte orientale de Madagascar à la limite des Hauts-Plateaux, dans la région d'Antongil et de Foulpointe, particulièrement dans les mangroves marécageuses, mais aussi en Asie ou à Hawaï. Cerbera odollam (cerbera : le chien à trois têtes des enfers) est appelé l'"arbre du suicide" au Kerala en Inde, les trois-quarts des victimes étant des femmes – suicide ou empoisonnement. Une équipe de toxicologues franco-indienne a identifié 500 cas entre 1989 et 1999 (Gaillard Y, Krishnamoorthy A, Bevalot F. "Cerbera odollam: a 'suicide tree' and cause of death in the state of Kerala, India". J Ethnopharmacol. 2004 Dec ; 95(2-3) : 123-6 ; New Scientist du 26 novembre 2004). C'est un arbuste à rameaux dressés assez proche du Laurier-rose (Nerium oleander) – qui appartient à la même famille, les Apocynacées, et qui est, lui aussi, un hétéroside cardiotonique. Il produit un latex laiteux. (Le terme "hétéroside" renvoie à la composition spécifique de ces glucides, formés d'oses et d'éléments non glucidiques – à la différence des oses ou monosaccharides).

Le fruit du Tanguin, dit kebona, est une drupe de couleur jaunâtre. Le sarcocarpe est d'un jaune verdâtre, inodore, à forte saveur amère. Ce fruit mesure de 4 à 6 cm. en longueur, sur 4 à 5 de largeur. L'enveloppe charnue recouvre un gros noyau ligneux, extrêmement dur, plus ou moins aplati, irrégulièrement marqué de sillons et d'alvéoles. Ce noyau étant ouvert découvre une sorte de coque ovoïde, crustacée et brunâtre. L'amande est formée de deux cotylédons épais et charnus ; elle présente à l'une de ses extrémités une petite radicule. On dit que les fruits de couleur rouge seraient les plus vénéneux. On dit aussi qu'une des espèces serait simplement émétique, tandis qu'une autre espèce de Tanguin serait toxique et que seule la saveur permettrait de les distinguer.

Dans la continuité des travaux de Claude Bernard sur les substances toxiques, Chatin (1873) rappelle qu'il existe trois sortes de paralysie (liées à la perte de la sensibilité, à la paralysie des nerfs moteurs et à la paralysie du système musculaire), correspondant à trois groupes de poison ayant pour type la strychnine (1), le curare (2) et le sulfocyanure de potassium (3). C'est exclusivement à ce troisième type, conclut Chatin, que doit être rapporté le Tanguin. (Chatin, 1873, p. 35)

Un médicament et un "poison du cœur"

Le Tanguin est donc classé parmi les "poisons du cœur", comme la digitaline et les strophantines. Poison, mais aussi médicament. L'article de 1982 auquel j'ai fait référence plus haut a pour objet de fournir un équivalent local à la digitaline, médicament prescrit à Madagascar (aussi) comme tonique cardiaque. Les médicaments aujourd'hui utilisés sont la Digoxine Nativelle, la Cédilanide et la Digitaline Nativelle (Claude-Adolphe Nativelle a réussi, entre 1844 et 1872 – il obtient le prix Orfila, savant que j'ai cité plus haut, en 1872 – à isoler et à cristalliser la digitaline à partir d'extraits de la digitale).

Digitaline Nativelle, 1911

Ces médicaments communs sont généralement dérivés de la digitale pourpre (Digitalia purpurea) ou de la digitale laineuse (Digitalia lanata).


Digitalia purpurea
http://www.panoramio.com/photo/23151741

Les hétérosides cardiotoniques traitent l'insuffisance cardiaque, soit une faiblesse du muscle qu'est le cœur, cette atonie causant une diminution du volume d'éjection systolique et, parfois, une stase veineuse en amont de la pompe cardiaque. Sans rentrer dans le détail des échanges chimiques qui commandent la communication cellulaire dans le cœur, je rappellerai simplement que l'action des hétérosides cardiotoniques s'exprime par une modification de la perméabilité des membranes cellulaires. Ces substances inhibent l'enzyme (pompe à sodium) qui assure le transfert entre les membranes cytoplasmiques et leur action tonique (leur toxicité aussi) se traduit par une augmentation de la force contractile (effet inotrope positif – étym. qui contracte la fibre, inos), l'élévation corollaire du taux de calcium intracellulaire stimulant l'action des myofibrilles responsables de la contraction. C'est ce qui, à forte dose, bloque la relaxation diastolique et provoque arythmie et fibrillation…


La pompe sodium-potassium (ou Na+-K+ ATPase) est une enzyme transmembranaire. Elle joue un rôle dans le maintien du potentiel de repos des cellules nerveuses, musculaires et cardiaques. La pompe permet d'échanger les ions sodium (Na+) issus du milieu intracellulaire avec les ions potassium K+ issus du milieu extracellulaire dans un rapport précis (3 Na+/2 K+). Cette pompe est responsable du rétablissement de l'équilibre initial après décharge. La digoxine et l'ouabaïne ou strophanthine bloquent la pompe sodium.

La cellule baigne dans un milieu qui contient un nombre important d'ions Na+ (sodium), alors que dans son cytoplasme les ions K+ (potassium) dominent. Dans la membrane plasmique, des canaux ioniques spécifiques restent ouverts et permettent le passage d'ions en fonction des gradients de concentration à l'intérieur et à l'extérieur de la cellule.
La cellule étant plus riche en potassium que le milieu extracellulaire, le potassium est diffusé à l'extérieur par simple expansion. A l'inverse, le Na+ (sodium) rentre dans la cellule, car il y en a beaucoup plus dans le milieu extracellulaire. Pour rétablir le déséquilibre ionique nécessaire au fonctionnement de l'unité, des pompes appelées Na+- K+- ATPase assurent le transport de ces ions. Ce transport se faisant dans le sens inverse des intensités de concentration de part et d'autre du cytoplasme, il consomme de l'énergie. De l'ATP (adénosine triphosphate) est transformé en ADP (adénosine diphosphate) avec libération d'un Pi (phosphate inorganique) et de 30,5 kJ. Cette dégradation nécessite la présence d'une enzyme ATPase, ce qui explique le nom "pompes à sodium" donné à ces enzymes.


Inversion de l'échange cellulaire : effet inotrope par élévation du taux de calcium.


Le latex du Tanguin contient de la thévétine, l'alcaloïde en cause, contenu dans le fruit, est la cerbérine. Tous les expérimentateurs insistent sur le fait que la différence entre la dose médicamenteuse et la dose létale des cardiotoniques est subtile. (Une synthèse de la littérature scientifique concernant le Tanguin est accessible dans : Y. Gaillard, M. Cheze, G. Pépin : "Intoxications humaines par les végétaux supérieurs : revue de la littérature", Annales de Biologie Clinique. Volume 59, Numéro 6, 764-5, Novembre - Décembre 2001, Article électronique).

Une épreuve judiciaire

La célébrité du Tanguin est liée à son utilisation dans cette procédure judiciaire qu'on appelle une "ordalie" ou "jugement de Dieu". Comme un bon dessin vaut mieux qu’un long discours, je vais utiliser un pictogramme pour représenter le principe cosmologique de l'ordalie.

L’idéogramme chinois qui signifie roi (wang) s’écrit en représentant trois traits horizontaux reliés par un trait vertical. L’étymologie populaire de cet idéogramme explique que le roi est celui qui met en communication la terre, le monde des humains et le monde céleste. Le roi est un médium. Voilà la représentation traditionnelle de la justice et le Tanguin est, à sa manière, un tel médium. Cette conception est évidemment étrangère à notre conception de la recherche de la vérité, quand ce sont les preuves matérielles qui permettent de confondre le coupable. La proposition blasphématoire suivante : “La question de l’existence de Dieu est un problème qui ne regarde que lui” marque cette séparation entre le monde d'en haut et celui d'en-bas. C’est la différence entre l’astrologie et l’astronomie : il n’y a plus de communication entre les différents plans de l’univers. C’est aussi la différence entre la justice transcendante, la foudre des dieux, et la justice immanente si j’entends par là la justice des hommes.

L’ordalie est donc une épreuve judiciaire dont l’issue, réputée dépendre d’une puissance surnaturelle, établit la culpabilité ou l’innocence d’un individu quand, dans la généralité des cas, la justice des hommes se révèle impuissante à le faire. Je ferai état ici d'une donnée de terrain quand, demandant à un notable du village d'Ambila-Manakara ce qu'il pensait de l'usage traditionnel du Tanguin, il répondit que cet arbre ne poussait pas dans la région, tout en faisant remarquer que le mot fatrangena qui désigne le poteau de fondation du village, auprès duquel on prononce les serments et les imprécations contenait le mot tanghena, "vérité". C'est en effet l'étymologie du Tanguin.

Le cas du Tanguin est intéressant dans la mesure où l'on possède des textes malgaches qui expliquent sa signification et son mode d’action ordalique : le Manuscrit de l'ombiasy, l'Histoire des rois et les Coutumes malgaches. Ces textes permettent de comprendre selon quelle conception de l’ordre du monde l’épreuve judiciaire peut discriminer la vérité. De surcroît, des circonstances historiques particulières, l’expansion merina pendant le règne d’Andrianapoinimerina (1787 - 1810), permettent aussi d’appréhender l’utilisation “politique” qui a pu en être faite. C’est sous règne en effet que l’administration du poison devint une institution minutieusement organisée.

Je commencerai par les descriptions les plus anciennes, dues à des étrangers, de l'administration du Tanguin.

Virey, 1822 :
"Quand un Madécasse est condamné à boire le Tanguin, on râpe des semences de cette plante, puis on prend des feuilles de Longouze ou grand cardamone de Madagascar (dont le fruit est aromatique et ressemble à la graine de paradis), Amomum Madagascariense Lamarck. On pile ces feuilles pour en extraire quelques onces de suc qui est aromatique ; c'est dans ce liquide qu'on met la semence râpée du Tanguin. Ordinairement l'accusé boit avec assurance cette amère potion. Ce mélange d'une substance aromatique et d'un poison nauséeux paraît avoir pour but d'en déguiser la saveur ou d'en modifier l'action funeste." (Virey, 1822, loc. cit. p. 92).

Freeman, 1830 :
"Quant à l'exécution même, on procède généralement comme suit. L'accusé, ayant ingurgité autant de bouillie de riz qu'il le pouvait [sosoa : bouillie de riz ou de maïs, terme qui donne sosso en créole réunionnais ; le vary sosoa est une recette traditionnelle malgache], avale, sans les mâcher, trois morceaux de peau de poulet, de la dimension d'un dollar [d'une piastre]. On lui demande ensuite de boire le test, une petite quantité de noix de Tanguin râpée, mêlée à du jus de bananier. Le Panozondoha, (juge de l'épreuve), place alors sa main sur la tête de l'accusé et prononce la formule de l'imprécation, appelant les châtiments les plus terribles sur la tête de l'accusé, s'il est coupable. Puis on lui fait ingurgiter une grande quantité d'eau de riz. Les matières renfermées dans l'estomac sont alors rejetées ; - si l'examen y fait retrouver les trois morceaux de peau de poulet, le patient est déclaré Madio, propre – légalement et moralement innocent de toute charge, – dans le cas contraire, il est irrémédiablement déclaré coupable […]" (Lettre du Rev. J. F. Freeman adressée de Port-Louis, Mauritius, le 1er juillet 1830, dans W. J. Hooker, Botanical Miscellany, 1833, tome III p. 276, London, John Murray.)

Il peut y avoir des différences dans la procédure mais la trame est identique, elle repose sur l'association des propriétés toxiques et des propriétés vomitives de l'amande. Outre la virulence toxique de la noix choisie par l'opérateur, la durée de l'invocation au Tanguin, avant que l'on commence le second "entonnage" de sosoa à l'accusé, paraît déterminante puisqu'elle provoque l'absorption ou le rejet du principe toxique. On procédait d'ailleurs à une sorte de préparation des voies digestives du patient en lui faisant mâcher un morceau de courge séchée mêlée à de l’eau de riz épaisse, ceci, explique le conteur des Fomba Malagasy afin que le Tanguin ne glisse pas trop vite dans l’estomac du patient. C’est alors seulement qu’on fait prendre le poison. (On note ici une divergence entre les Tantaran’ny Andriana les Fomba Malagasy quant à l’ordre selon lequel on faisait avaler les morceaux de peau de poule, avant ou après le poison.)

L'invocation de l'esprit du Tanguin

Il existe, je l'ai dit, plusieurs documents, écrits en malgache, qui exposent la procédure de l'ordalie. Le Manuscrit de l’ombiasy, de facture locale, les Tantaran’ny Andriana les Fomba Malagasy, recueillis par Callet et Cousins. J'ai eu l'occasion de présenter ces documents ailleurs (“Le tanguin, poison d'épreuve à Madagascar : mode d'emploi”, in La culpabilité, P.U.L.I.M., Limoges, 2001) et j'en ferai ici mention succinctement. L'intérêt du Manuscrit de l’ombiasy, dont l’auteur en est "l’un des derniers survivants des ombiasy [devins] de Ranavalona 1ère", qui régna de 1828 à 1861, rédigé en 1864 et 1865 est qu'il donne le point de vue autochtone sur la pratique en cause et qu'il expose la fonction mystique attribuée à la substance ordalique.

Le poison est invoqué et magnifié en ces termes : "Entends, entends, entends, entends, écoute bien ô Manamango [esprit du Tanguin], tu es un œuf rond, le remplaçant de Dieu, le porte-parole du Créateur, n’ayant pas d’yeux, mais qui voit, n’ayant pas d’oreilles mais qui entend, n’ayant pas de bouche, mais dont on approuve les dires et les paroles, alors entends, écoute bien, ô Manamango." "Entends, entends, entends, entends, écoute bien. Tu étais dans une contrée lointaine, aux quatre points cardinaux, au bord de la mer ; là où tu cherchais fortune, on t’a cherché là-bas comme on cherche de l’argent, on t’a cherché là-bas comme on cherche des perles, que ce soit un noble, un roturier ou un esclave qui t’a cherché là-bas. On t’a cherché ô Manamango pour être le porte-parole de Dieu, le remplaçant du Créateur, pour être le juge des nobles, pour être le juge du peuple, pour être un arbitre qui prononce le verdict, pour être juste et parfait, pour condamner les coupables et acquitter les innocents. Alors entends, écoute bien, ô Manamango."

Dans un deuxième temps, le texte expose la supériorité judiciaire du poison d’épreuve sur la justice des hommes : "Entends, entends, entends, entends, écoute bien ô Manamango", tu es venu de l’Est, tu es monté dans ces régions "où il y avait des nobles, où il y avait des souverains qui exerçaient leur domination". "Mais qu’ils soient les chefs de centaines ou de milliers de nobles, lorsqu’ils rendaient la justice, ils le faisaient avec partialité, ils ont jugé à fleur de peau, ils ont jugé à la légère, ils se laissaient corrompre par l’argent et la richesse, ils ont remis en cause des jugements antérieurs [...] ils ont été incapables de juger."

Le poison avalé, l’andriandahy commence les imprécations. "Entendez, écoutez, ô Manamango, vous êtes maintenant parvenu jusqu’à son ventre ! le voyez-vous car vous êtes maintenant mêlé à lui et à ses os : s’il a ensorcelé, mettez-le à mort ! que sa vie s’achève ! puisse-t-il mourir ! et surtout s’il a déclaré : moi je ne meurs pas du Tanguin : s’il agit de la sorte mettez-le à mort ... S’il n’est pas coupable de tout cela, faites-le vivre et il vivra."

Le Tanguin et la politique

C’est sous le règne d’Andrianapoinimerina (le "Prince cher au cœur des Merina", 1745-1810), que l’institution du Tanguin prend corps. Tantaran’ny Andriana, p. 112 : "Sous Andrianapoinimerina les idées sur le Tanguin et son essai se développèrent. L’administration du Tanguin au poulet, courante auparavant chez les ancêtres, fut utilisée par Andrianapoinimerina pour unifier son royaume". L’habilitation mystique de la noix était vérifiée sur un poulet, ce qui permettait de constater son effet en réveillant l’esprit caché dans la noix. On s’adresse à cet esprit, "dont le nom Ramanamango, évoque la perfection" (G. S. Chapus et G. Mondain) en ces termes : "C’est un œuf ceci, ô Manamango, et il est devenu poulet ; engendré par un coq et né d’une poule, il crie quand le jour paraît et court rapidement dès le matin ; il sait distinguer le jour et reconnaître la nuit. Si donc vous savez juger suivant la vérité, votre sentence aujourd’hui ne nous trompera pas. Que l’eau soit insipide, tuez-le ; qu’elle soit bien chargée, tuez-le ; oui, entraînez la mort de ce petit poulet ; car il est un essai pour faire périr, pour montrer que vous n’êtes pas un Tanguin indulgent à tout, ô Manamango. Si donc vous ne voulez pas tuer les justes, mais effectivement condamner les coupables, ô Manamango, faites périr ce petit poulet". Après ce premier essai sur un poulet dont la mort a été demandée, on soumet à l’épreuve un second poulet dont on demande le maintien en vie en disant : "Ce n’est pas par haine qu’on a fait périr l’un et ce n’est pas par affection qu’on veut faire vivre celui-ci [...] c’est un animal d’essai à laisser vivre".

La codification de l’épreuve par Andrianapoinimerina est décrite en ces termes dans les Tantaran’ny Andriana (p. 831) : “Voici ce que je vous déclare, ô mes sujets. Dans ce pays c’était le gouvernement de la multitude ; mais maintenant Andriamanitra me l’a donné. Autrefois tous les gens agissaient à leur guise. Je ne le permettrai plus, mais j’y veux mettre une barrière. Jusqu’ici, ajouta-t-il, des hommes, les Tahiamanangaona avaient des amulettes malfaisantes : ils faisaient monter l’eau au village par un mortier qui marchait tout seul [...] car il est des choses qu’on ne doit plus voir dans le pays, amulettes malfaisantes et sorcellerie [...] j’ai trouvé une voie de justice dans le tangena ; par lui on découvrira les sorciers, les possesseurs d’amulettes malfaisantes, de charmes d’amour, les menteurs et les gens sincères”.

L’institution du Tanguin par Andrianapoinimerina s’accompagna de protestations de fidélité au roi dont les démonstrations marquèrent les esprits et contribuèrent à renforcer le caractère d’impartialité de l’épreuve. Selon la narration des Tantaran’ny Andriana, le conseiller du roi, Hagamainty, déclara devant le peuple : “S’il y a vraiment un juge qui permette de reconnaître les coupables et les innocents, qu’on nous juge tous immédiatement. Nous vous remercions de la paix nouvelle que vous apportez par ce don du Tanguin.” Alors, le chef du clan des Tsimahafotsy, allié d'Andrianapoinimerina proposa que les siens se soumettent en premier à l’épreuve : “Nous sommes les pères de la population [...] ainsi vous éprouverez vos propres serviteurs.” On fit ainsi et certains Tsimahafotsy ne survécurent pas à l’administration du poison. Les gens du palais se soumirent aussi à l’épreuve. Et Ampodiaina, particulièrement apprécié du souverain, succomba. Ce qui démontra au peuple le caractère sacré du poison. (Tantaran’ny Andriana, p. 832)

Faire du Tanguin, sous la responsabilité du roi, le seul moyen mystique de gouvernement, cela supposait donc de combattre la puissance occulte détenue par les fabricants de charmes “privés”. Andrianapoinimerina interdit en conséquence un certain nombre de charmes en mesure de concurrencer le pouvoir royal, mais aussi de troubler l’ordre public. En décrétant le monopole du Tanguin, de sa récolte, de sa détention et de son administration, il réalisait ainsi la centralisation religieuse du royaume en quelque sorte, mettant ses propres fétiches sous la protection du Tanguin. Le Tanguin devient le symbole et l’instrument de l’ordre royal : "Pour éviter toute dispute, dit le roi, j’ai institué la brasse, l’empan et le pied... Sept pieds et sept empans font une brasse. Si vous vous querellez encore, dans ces conditions, vous serez manohi-drano, en lutte ouverte contre le Tanguin". On voit que le Tanguin se révèle l'instrument mystique de l'unification économique, administrative et politique du royaume.

Dans certaines occasions, l’épreuve concernait un grand nombre de personnes, elle était alors appelée tavibe (littéralement : la grande cuvette). On lit dans les Tantaran’ny Andriana (page 834) (G. S. Chapus et G. Mondain, p. 186) qu’on administrait le poison aux gens d’un village ou d’une région si un envoyé du roi avait été ensorcelé. Les mêmes mesures étaient prises quand un personnage important mourait. "La population au milieu de laquelle avait vécu le défunt devait se disculper de tout soupçon de maléfice à son égard en prenant le poison". "On faisait prendre aussi le Tanguin aux habitants d’un village quand ce dernier avait mauvaise réputation", explique le même passage des Tantara. Mais ce qui occasionnait avant tout cette administration générale du Tanguin c’était ou bien un déplacement projeté du roi qui ordonnait, suivant l’expression consacrée, de tuer les rats tout au long du chemin qu’il pensait parcourir, c’est-à-dire d’exterminer tous les suspects, ou bien la circoncision en bloc des enfants d’une région.

Dans le cas du tavibe, tous les gens du village devaient s’associer au serment fait à la grande porte d’entrée. D’après le début de la page 836 des Tantaran’ny Andriana, on déclarait : "En prêtant serment nous aidons à la recherche des sorciers et de ceux qui ne le sont pas. Il ne s’agit pas de dire "Je déteste" ou "Je n’aime pas". Nous tous ici, petits et grands, nous répétons : Puissent les os du menteur être dispersés ; puisse-t-il mourir sans enfant ; puisse-t-il crever comme ce mouton que voici, vaincu par ce serment que nous faisons à la porte ; car c’est ici qu’on sort et ici qu’on entre".

Le fléau de la balance de la justice et l'ordalie

Il y avait des accommodements avec le Tanguin. On pouvait ainsi choisir des fruits non encore parvenus à maturité, des noyaux de couleur pâle, moins vénéneux que les autres, varier les dosages, etc. On pouvait acheter les préposés au poison... L’imprécation était vraisemblablement plus ou moins longue selon le sentiment que l’accusateur pouvait avoir (ou voulait donner) de la culpabilité du patient, car c’est seulement l’imprécation achevée qu’on faisait ingurgiter au patient l’eau de riz épaisse qui devait aider aux vomissements. S’il était dans l'intention de l’exécuteur et de ses assistants de donner une issue fatale à l’épreuve, lit-on dans les Fomba malagasy, il y avait des moyens (p. 183).

Sans doute a-t-on pu dire qu’Andrianapoinimerina avait fait du Tanguin un "moyen de police". La réalité de cette instrumentalisation d’une épreuve mystique pose question. Quand Andrianapoinimerina déclare : "Je fais du Tanguin le révélateur de mon royaume et je n’ignore pas ce qu’ont fait mes douze prédécesseurs : mes ancêtres aussi ont pris celui-là comme rassembleur et révélateur du royaume, suivant l’ordre d’Andriamanitra lui-même" (Tantaran’ny Andriana, p. 765), il se pose comme le maître des charmes. La référence aux Tahiamanangaona et à leurs "amulettes malfaisantes" vise un clan qui s’était opposé à son expansion sur l’Imerina. Les ennemis d’Andrianapoinimerina ce sont bien entendu les Tahiamanangaona, mais bien davantage, pourrait-on dire, leurs fétiches. "Je m’arrangerai, dit-il (G. S. Chapus et G. Mondain, p. 166) pour que ces gens ne puissent plus faire croire à leur pouvoir, et je briserai tous ceux qui voudraient les imiter". Cela s’exprime par la recherche systématique et "obsessionnelle" de la sorcellerie... Andrianapoinimerina dit au peuple : "Au sujet des charmes maléfiques et de la sorcellerie, voici les lois dont je tiens à vous parler : je désire faire boire le Tanguin aux coupables, mais je veux d’abord vous en entretenir, vous mes sujets [...] Si nous procédons à cette épreuve, ce sera la sécurité pour vous ; les sorciers et les producteurs de charmes maléfiques disparaîtront ; et quant à moi, j’estime qu’il est bon d’user du Tanguin". La lutte politique s’exprime sans doute par le choc des armes, mais aussi dans le choc, si l’on peut dire, des charmes. Instrument de l'ordre public, mais non pas au sens de "moyen de police" d'un État profane : "moyen de police", sans doute, mais d'un État mystique, vulnérable aux puissances maléfiques.

Une déclaration d’Andrianapoinimerina montre, en effet, non pas un souverain jouant de la crédulité de ses sujets, mais parfaitement persuadé de la réalité des charmes de ses adversaires et entrant dans une sorte de rage pour écraser ce qu'il se représente, non comme une opposition politique passible de ses armées, mais comme une réalité qui provoque chez lui la répulsion, le dégoût et une explosion de haine. Hagamainty (son conseiller) demande ce qu’il faut faire contre ceux qui auraient des charmes supérieurs à ceux du Tanguin : "Il faut mettre à mort aussitôt ceux qu’on pourrait supposer susceptibles de faire obstacle à l’emploi du Tanguin : on les étranglera. Et il ajoute : si quelqu’un auquel on fait prendre deux fois la drogue est accusé par le peuple d’être réfractaire au Tanguin, qu’on recommence l’épreuve une dernière fois avec des imprécations violentes en disant : qu’il soit réfractaire ou non, qu’il meure ! S’ils résistent encore à l’épreuve, c’est qu’ils sont en effet réfractaires ; alors étranglez-les, mettez-les la tête en bas dans un silo à riz où l’on versera de l’eau bouillante. Et s’ils vivent encore, transgressez tous leurs tabous ; mettez des poils de chien noir, de l’ambiaty, du chiendent, de la cendre, et jetez tout cela dans le silo avec de l’eau bouillante ; puis, s’ils ne sont pas encore morts, découpez-les en morceaux, jetez une partie au courant de l’eau, et le reste aux chiens." (G. S. Chapus et G. Mondain, p. 172)


Quoi qu’il en soit, la conception du mode d’action du poison d’épreuve révèle une administration de la justice conforme à l’ordre supra-humain. Un informateur du Père Callet à propos de l’ordalie au fer rouge : “Ce n’est pas par méchanceté envers cet homme, mais pour reconnaître votre force ô Dieu, car votre sagesse est au-dessus de notre connaissance ; et si c’est un homme de bien, cela ne lui fera aucun mal”. La manière dont on se détournait du coupable, selon le témoignage de Freeman, montre que celui-ci, loin de susciter un sentiment d’identification (pour ne pas parler de compassion), était aussitôt perçu comme une dangereuse souillure dont il fallait aussitôt délivrer la communauté. Portant une menace contagieuse de désorganisation des ordres, il devait être immédiatement annihilé.

Ce que paraît montrer aussi la manière dont un inculpé, lavé de l’accusation par le poison, était réintégré parmi les siens. Cette réintégration donnait lieu à de véritables cérémonies. “On allait consulter l’astrologue pour savoir le meilleur jour à prendre en vue de la rentrée officielle et solennelle de l’acquitté dans sa demeure. On organisait alors une véritable procession désignée d’après les Fomba Malagasy par le terme de “mampakatra mpinona” (la remontée de celui à qui on a fait boire le Tanguin). On remarquera, notent Chapus et Mondain, que ce terme de mampakatra est également employé pour désigner la réception de la fiancée le jour du mariage. Il y avait bien reprise, par l’accusé délivré, de ses relations primitives avec les siens et avec la société. On l’ornait d’ailleurs de ses plus beaux habits : on lui mettait dans les mains un bouquet de fleurs de nénuphars parfois appelée les fleurs que le feu ne saurait atteindre et il montait, entouré de tout un cortège d’amis et de parents portant aussi de ces mêmes fleurs attachées au bout de l’herbe sacrée (tsontsoraka). Mais avant de se mettre en route, il fallait attendre l’achèvement d’une autre cérémonie, celle de la purification de l’ex-prévenu.

Voici ce qu’il en est rapporté à la page 416 des Tantaran’ny Andriana : “Si celui auquel on fait subir l’épreuve survit, on le baigne avec de l’eau lustrale de la corne blanche, qui est un des principaux instruments des pratiques habituelles des gardiens de fétiches. Dans cette eau, on a mis des herbes tsiriry et hahibita. Ce bain se fait soit un lundi, soit un mercredi, jours au destin puissant. On apporte de l’eau de la corne blanche, on y ajoute les plantes et on en asperge celui qui a bu le Tanguin ainsi que tout le chemin qu’il doit prendre pour rentrer chez lui [...] Avant l’arrivée du cortège au village, on a tué un bœuf ce qui est à la fois un acte de réjouissance et un sacrifice de purification [...] La viande des bœufs sacrifiés en cette occasion est dite henan-doza (viande du malheur ; les gardiens d’idoles et les nobles se gardent d’en manger, car cela leur porterait malheur).


Le Tanguin et la sorcellerie

Il est significatif, dans les invocations des Fomba Malagasy, que ce soit exclusivement le crime de sorcellerie qui soit explicitement recherché par l’administration du Tanguin. "Si cet homme a "un charme capable de faire mourir une personne, susceptible d’ensorceler le Roi ou d’ensorceler le peuple, d’ensorceler des hommes ou d’ensorceler des femmes, d’ensorceler des enfants ou la fortune des gens, s’il a un charme capable de provoquer la mort, vous entrerez dans sa bouche et descendrez dans ses entrailles : faites-le périr vite, tuez-le promptement, éteignez le souffle de sa vie ; faites de lui un cadavre s’il ensorcelle et qu’il ne vive pas. S’il ensorcelle et le nie très fort ; s’il compte sur ses amulettes toutes-puissantes, s’il compte sur l’antidote pour vous neutraliser ; s’il s’attend à être aidé par un contrepoison ; mais vous n’admettez pas l’efficacité de cela ô Manamango ; mettez-le à mort, s’il ensorcelle, ne le laissez pas vivre ô Manamango."

Et la sorcellerie, à l’exclusion des autres crimes, fussent-ils aussi graves que le crime d’inceste, par exemple, ainsi qu’il est explicitement développé. "Je vais distinguer, je vais préciser, ô Manamango.... comme il habitait avec des gens, il a pu commettre des fautes, et a encouru des blâmes vis-à-vis des morts et des reproches vis-à-vis des vivants, mais si ce ne sont là que des blâmes, un simple sujet de reproche, s’il n’est pas coupable de sorcellerie, faites-le vivre ô Manamango. Il se peut qu’il ait couché avec des personnes avec qui il ne devait pas avoir de rapports et qui devaient être taboues pour lui, il se peut qu’il l’ait su et qu’il l’ait fait délibérément, ô Manamango ; mais si c’est le cas, s’il n’y a pas de sorcellerie, accordez-lui la vie. Il se peut qu’il ait compté être dans un pays caché ou qu’il ait compté sur les gens qui étaient près de lui ou qu’il se soit simplement nourri des biens du roi ou de ceux du peuple ; mais ce n’est pas cela que vous retiendrez ô Manamango, car ce sont là seulement des contestations pour acquérir des biens ; mais si ce sont là des fautes graves et un sujet de reproche, vous ne retenez pas ces cas ô Manamango ; et s’il n’est pas coupable de sorcellerie, faites-le vivre, ô Manamango […]"


"Il se peut qu’il ait simplement fait un vœu à des Vazimba, ou qu’il en ait fait à un sorcier, qu’il ait promis d’enduire une pierre de graisse et de faire un don en argent, puis qu’il n’ait pas fait de don ou rempli sa promesse ; ce serait donc là le malheur qui le frappe, ô Manamango, et non la sorcellerie […] ce serait pour le seul crime de sorcellerie que vous le feriez périr ô Manamango [...] Il se peut qu’il ait pris seulement un charme à l’usage des taureaux, ou rien de plus qu’une amulette contre la grêle, ou une contre la maladie des petits enfants, car il voudrait voir les siens dodus ; mais s’il n’y a pas ajouté, ô Manamango la sorcellerie qui cause la mort, accordez-lui la vie. Je vais distinguer, je vais préciser... Il a pu y avoir des gouttières dans sa maison en été ; il se peut que le faîte de sa maison soit brisé, que la trame de son lamba soit trop courte ou qu’il ne s’habille pas en hiver ; il se peut que ce soit là le malheur dont il est maintenant atteint [...] mais si ce sont là des malheurs tels qu’il y en a sur la terre et sous les cieux, ce n’est pas cela qui peut le faire arrêter ; s’il n’est pas coupable de sorcellerie, faites-le vivre ô Manamango. Je crains que le serpent d’eau ne vienne sur la terre, je crains les êtres d’un talent supérieur, je crains les descendants d’un talent supérieur ; je crains les lézards à deux queues, [...] quels que soient les dangers qu’il voie, ce n’est pas cela qui le retient, ce n’est que pour la sorcellerie que tu le mets à mort. Il a demeuré auprès du roi, il a demeuré auprès du peuple, mais ce n’était qu’une souillure, il n’a fait que salir la grande cuillère et que salir la zinga [calebasse à long manche pour puiser l'eau]; mais si c’est là de la souillure ô Manamango, ce n’est pas de la sorcellerie ; aussi laissez-le vivre. Il est allé du côté du nord, il est allé du côté du sud, il est allé du côté de l’est, il est allé du côté de l’ouest ; il a rencontré une pierre, il a rencontré un sorcier ; il a déclaré qu’il enduirait une pierre de graisse et pourtant il ne l'a fait aucunement ; il a déclaré qu’il donnerait de l’argent et pourtant il n’a pas agi conformément à sa promesse, ni donné proportionnellement à sa fortune. Mais ce n’est pas cela que vous retenez ô Manamango. Il a demeuré auprès du roi ; il a demeuré auprès du peuple ; il a demeuré auprès des gens qu’il aimait ; il a fait le serment du sang ; il a fait des choses pénibles, il en a fait d’amères ; je crains qu’il n’ait violé le veli-rano [litt. "frapper l'eau" : pacte conclu entre deux protagonistes], qu’il n’ait contrevenu aux accords conclus, qu’il n’ait fait un faux serment, ô Manamango et je crains que ce ne soit là un danger funeste à ses jours ô Manamango. Aussi entendez, écoutez bien ; aussi ne prêtez pas l’oreille aux cris du peuple.”


En guise de conclusion de cette présentation monographique ("L'anthropologie sans ethnologie est vide, l'ethnologie sans anthropologie est aveugle"...)

L'association du Tanguin et de la "sorcellerie" est révélatrice d'un certain nombre de données quasi "universelles".
- D'abord de l'univers persécutif du monde traditionnel ; d'où les multiples "garanties" (en créole réunionnais), ody en malgache, dont il faut s'entourer.
- Que la représentation de la sorcellerie – ce que l'on dénomme tel – focalise la négativité sociale, ici, sous les espèces de la puissance de leurs sortilèges : les opposants politiques d'Andrianapoinimerina.
- La liste des charmes licites permet d'inférer la nature de l'action sorcellaire. Ne pas tenir ses engagements, prendre une amulette contre la grêle, contre la maladie de ses enfants ; avoir le toit de la maison qui fuit, ou dont le faîte est brisé ; porter un vêtement de pauvre... tout cela c'est être victime du malheur ordinaire ; "il a sali la zinga, la grande cuillère à puiser l'eau", mais c'est seulement souillure et non sorcellerie... On voit par cette énumération que c'est l'intention de nuire qui discrimine la sorcellerie. Mais aussi que l'imputation de sorcellerie fonctionne comme un moyen de régulation sociale. Celui qui est frappé à répétition par le malheur en devient suspect, mais encore celui dont la réussite est, comme on dit, "insolente". Celui, d'une manière générale probablement, qui est autre. L'étranger, la femme qui urine sur sa natte, etc. Celui-là, "vous entrerez dans sa bouche et descendrez dans ses entrailles : faites-le périr vite, tuez-le promptement, éteignez le souffle de sa vie."
- La proximité de la magie et de la "pharmacie" (j'emploie ce terme à dessein puisqu'en grec ancien il est ambivalent, poison et remède). L'individu que le sens commun qualifie improprement de "sorcier" est, dans la société traditionnelle, un intermédiaire rituel et sa médiation, la sienne ou celle qu'il administre, passe, le plus souvent, par l'utilisation d'essences végétales (volohazo à Madagascar). Cette position marginale le rend sans doute inquiétant, puisqu'il est ici et "ailleurs" à la fois, dans la société et hors société. Il utilise la "magie" qui est présente dans la nature, ces essences aux propriétés curatives, hallucinatoires ou toxiques... – Expert en "plantes des dieux", pour reprendre le titre d'un ouvrage célèbre.
- L'ombiasy est le dépositaire d'un savoir technique qui se manifeste notamment dans la connaissance des vertus des plantes et dans les techniques de divination. Ces dernières révélant, s'agissant du sikidy à Madagascar, un savoir mathématique transmis de génération en génération.
- Le devin-guérisseur joue un rôle social essentiel au village. Au-delà de l'expertise technique qu'il est en mesure de dispenser, s'agissant de maladie, d'alliances ou de conflits, de projections dans le futur ou d'offrandes aux ancêtres, c'est un "faiseur de paix" et sa consultation prend en compte la généalogie, l'histoire et la politique...
- L'homme-médecine, comme on l'appelle parfois, est nécessairement proche du pouvoir, en effet, spécialement quand celui-ci tire sa légitimité d'un ordre supra-naturel.

Comme on le voit avec le discours d'invocation au Tanguin, on est en présence, parallèlement aux enjeux politiques, d'une anthropomorphisation de la nature. Le poison invoqué (qui n'est pas le Tanguin profane : une croyance presque générale à Madagascar, rapportée par Chatin, voudrait que le Tanguin soit absolument inoffensif en dehors de l'épreuve - Chatin, 1873, p.13) fait office de médiateur entre le visible et l'invisible. Dans une juridiction incertaine, nécessairement imparfaite parce qu’administrée par la loi des hommes ("La justice arrive d’un pied boiteux" dit Horace), l’épreuve judiciaire introduit des indices divins qui permettent, en discriminant le pur de l’impur, la manifestation de la vérité. Cette conception repose sur un savoir expérimenté et déploie des techniques efficaces. C'est une banalité de constater que dans la société traditionnelle, le savoir technique, en effet – l’action des plantes médicinales, par exemple – est enveloppé dans la cosmologie et que son efficience est associée à des représentations humaines, alors qu’il fait l’objet de disciplines séparées et spécialisées dans le savoir qui est dispensé dans nos universités. Si donc l'on souhaite se donner des règles pour "herboriser" dans champ de l'ethnobotanique, il faut marquer, il me semble, qu'à la différence des plantes dont la représentation relève de ce que James Frazer a dénommé "magie sympathique" ou de l'ancienne "théorie des signatures" – et qui jouent symbole contre symbole – on est ici dans une procédure d'utilisation de molécules actives et de victimes bien réelles. Ce qui est donc spécifiquement en cause dans l'ordalie ici rapportée, c'est la mobilisation du savoir empirique par le savoir social – par la politique – les pratiques techniques et les représentations sociales et symboliques formant un tout. S’agissant de la sidérurgie en Afrique traditionnelle, par exemple, le forgeron ne fait pas de différence entre l’apport de manganèse qui facilite la réduction du fer en abaissant la température de fusion et l’ajout d’une crête de coq dans le foyer. J’ai tenté de montrer ailleurs****, concernant des pratiques ayant la reproduction d’une plante allogame pour objet, en Afrique centrale, le mil (Pennisetum) en l’occurrence, comment le processus de sélection et de domestication de la céréale était pensé en homologie avec l’éducation des jeunes gens et que les pratiques symboliques mises en œuvre dans la récolte conceptualisaient en termes humains des opérations purement techniques. (Ou comment la culture du riz à Madagascar engageait bien davantage que des considérations techniques et "économiques"*****). Avec le Tanguin, à une échelle qui s'explique probablement par la situation de choc culturel et d'encerclement que connaît Madagascar, particulièrement à l'époque de Ranavalona 1ère (qui règne de1828 à 1861), où la suspicion de sorcellerie est généralisée, on a le sentiment d'une inflation, quasi suicidaire, d'une pratique de régulation sociale d'un monde en sursis. Selon le pasteur Ellis, sous Ranavalona 1ère, c'est un dixième de la population qui est amenée à prendre du Tanguin au cours de son existence – évaluation évidemment exagérée. À propos de la moindre sortie de la reine, on procédait à ce qu’on appelait le "nettoyage des routes et à l’extermination des rats". La répression vise aussi les traitants européens : une loi du 13 mai 1845 les met en demeure de quitter l’île ou d’accepter d'être assujettis aux corvées royales et... à l’épreuve du Tanguin. Avec l'ethnobotanique du Tanguin, c'est aussi le drame de l'histoire et du choc des civilisations, loin de la poésie des métaphores et des signatures, qui nous interpelle. Retour de l'expansion européenne, la serre tropicale, "cage de verre, toute bouillante des flammes de l'été, perdue dans le froid clair de décembre", avec son exubérance et ses poisons, devient le symbole de la "dénaturation" du Second Empire.


NOTES :

* La "spéculation furieuse…" (préface), "une de ces sociétés qui poussèrent comme des champignons empoisonnés sur les spéculations impériales…" (1872, p. 103) ; la "dénaturation" et le "détraquement nerveux…" (préface).
Voici les passages du roman où il est fait état du Tanguin :
"Et les voix continuèrent, brutales, sonnant étrangement sous les palmes tombantes des massifs. Mais elles traversèrent comme un vain bruit le rêve de Renée, devant laquelle se dressait, avec l'appel du vertige, une jouissance inconnue, chaude de crime, plus âpre que toutes celles qu'elle avait déjà épuisées, la dernière qu'elle eût encore à boire. Elle n'était plus lasse.
L'arbuste derrière lequel elle se cachait à demi, était une plante maudite, un Tanghin de Madagascar, aux larges feuilles de buis, aux tiges blanchâtres, dont les moindres nervures distillent un lait empoisonné. Et, à un moment, comme Louise et Maxime riaient plus haut, dans le reflet jaune, dans le coucher de soleil du petit salon, Renée, l'esprit perdu, la bouche sèche et irritée, prit entre ses lèvres un rameau du Tanghin, qui lui venait à la hauteur des dents, et mordit une des feuilles amères."
(1872, p. 56)
"La jeune femme avait, toute la nuit, gardé aux lèvres l'amertume du Tanghin." (1872, p. 160)

"D'habitude, les amants se couchaient sous le Tanghin de Madagascar, sous cet arbuste empoisonné dont la jeune femme avait mordu une feuille. Autour d'eux, des blancheurs de statues riaient, en regardant l'accouplement énorme des verdures. La lune, qui tournait, déplaçait les groupes, animait le drame de sa lumière changeante. Et ils étaient à mille lieues de Paris, en dehors de la vie facile du Bois et des salons officiels, dans le coin d'une forêt de l'Inde, de quelque temple monstrueux, dont le sphinx de marbre noir devenait le dieu. Ils se sentaient rouler au crime, à l'amour maudit, à une tendresse de bêtes farouches. Tout ce pullulement qui les entourait, ce grouillement sourd du bassin, cette impudicité nue des feuillages les jetaient en plein enfer dantesque de la passion. C'était alors au fond de cette cage de verre, toute bouillante des flammes de l'été, perdue dans le froid clair de décembre, qu'ils goûtaient l'inceste, comme le fruit criminel d'une terre trop chauffée, avec la peur sourde de leur couche terrifiante."
(1872, p. 220)
"Elle rêva d'arracher une tige du Tanghin qui lui frôlait la joue, de la mâcher jusqu'au bois." (1872, p. 336)

** "Mais il était un lieu dont Maxime avait presque peur, et où Renée ne l'entraînait que les jours mauvais, les jours où elle avait besoin d'une ivresse plus âcre. Lors, ils aimaient dans la serre. C'était là qu'ils goûtaient l'inceste." (1872, p. 215)

*** Je remarquerai subsidiairement que la plante visée par Zola n'est probablement pas le Tanguin dont je vais parler, mais une plante aux propriétés toxiques, plusieurs de celles-ci, et à Madagascar même, étant désignées par le terme générique de Tanguin. L'auteur de la thèse de pharmacie publiée en 1873, à laquelle je viens de faire référence, parle d'échantillons de noix de Tanguin venus de Madagascar et en mauvaise conservation. Si le Tanguin parisien avait été en mesure de produire des fruits, il ne fait pas de doute que le chercheur en question en aurait fait usage, au moins à titre de comparaison… :
"
Parmi les noyaux que j'ai eu entre les mains, écrit-il, un très grand nombre ne présentaient plus, à l'intérieur de la coque, qu'un détritus noirâtre et pultacé ou plus souvent desséché, dernier témoin de l'amande et de son enveloppe." (p. 23) "J'ai essayé d'étendre mes recherches anatomiques aux étamines du Tanghinia venenifera, mais le très mauvais état des vieilles fleurs d'herbier que j'ai eues à ma disposition ne m'a pas permis d'atteindre sur ce point des résultats entièrement satisfaisants." (p. 27) "La quantité d'amandes sur laquelle je pouvais opérer était fort restreinte, et plusieurs de celles-ci étant complètement gâtées, je me vis forcé d'adopter une méthode en rapport avec mes ressources…" (p. 29)]

**** “Note sur l’Ame du Mil”, Journal des Africanistes, 1991. t. 61, fasc 2, Paris, et : http://www.anthropologieenligne.com/pages/05/5.1.html ; http://www.anthropologieenligne.com/pages/05/5.2.html.

***** "Riziculture traditionnelle et système de riziculture intensive (S.R.I.) dans la vallée de la Manañano", Revue Historique de l'Océan Indien, 2006, pp. 219-228.
http://www.anthropologieenligne.com/pages/rizM.html

Références

Andriananja, Max-Olivier, "Contribution à l'étude de deux variétés cardiotoniques de Tanghin à Madagascar, Thanginia venenifera (Apocynacées), Menabea Venata (Asclépiadacées)", Bulletin de l'Académie Malgache, t. 60/1-2, 1982 (1986).
Champion, Bernard,
“Le tanguin, poison d'épreuve à Madagascar : mode d'emploi”, in La culpabilité, P.U.L.I.M., Limoges, 2001 ; http://www.anthropologieenligne.com/pages/tanguinM.html.
Chapus, G. S. et G. Mondain, “Le Tanguin”, Bulletin de l’Académie Malgache, t. XXVII, 1946, pp. 157-188.
Chatin, Joannes, Recherches pour servir à l'histoire botanique, chimique et physiologique du Tanguin de Madagascar, 1873, Paris, Arnous de Rivière.
Cordemoy, Jacob (de), Flore de l’Ile de la Réunion, Paris, 1895.
Le Clerc, J., Des plantes médicinales de l'Île de la Réunion et de leur application à la thérapeutique, Saint-Denis, 1864, pp. 20-21.
Orfila, Mathieu-Joseph-Bonaventure, Traité de toxicologie, 4ième édition, tome second, Paris, 1843.
Rabearimanana, L., "Mystique et Sorcellerie dans le Manuscrit de l’Ombiasy (Manuscrit Hova de la Bibliothèque Grandidier - 1864-1870) - I. Le Tanguin" Omaly sy Anio, 1-2, 1975, pp. 295-324.


Rechercher dans :
http://www.AnthropologieEnLigne.com