page d'accueil
anthropologie du droit
ethnographie malgache

présentation
3 Éléments d'Ethnographie Réunionnaise
Mots clés : Créolité Ancestralité Citoyenneté Départementalisation Patrimoine
Champs : Anthropologie du développement Anthropologie de l'image Patrimoine
Sociétés créoles Histoire postcoloniale Sociologie des institutions


1- Vingt ans après

2- Barreaux (en construction)
architecture créole

3- "Types de la Réunion" (en construction)
(don à la Société de Géographie du 6 novembre 1885)

4- Ancestralité, communauté, citoyenneté :
les sociétés créoles dans la mondialisation (dossier pédagogique)

5- Madagascar-Réunion :
l'ancestralité (dossier pédagogique)

6- Ethnographie d'une institution postcoloniale...


introduction : éléments d'analyse
présentation thématique
liste chronologique

Une "perruque"*
à la Faculté des Lettres

le 5 mars 2000

à
[N19]

Cher [Collègue],


Une démission est l’occasion d’un bilan. Ce qui suit est le mien.

Tu nous es donc arrivé en 1995 (après un échec de ta candidature en [...] au Tampon) à la faveur d’une permutation dont l’origine était une demande de retour en métropole (pour des raisons de santé) de [X] que nous avions [...] recrutée.
Loin d’ostraciser ou de marginaliser un collègue que nous n’avons pas choisi, nous t’avons accueilli en te fournissant tous les moyens dont nous disposions.
En voici une liste non exhaustive :
- Nous avons fait l’acquisition – pour plus de 200.000 F d’un matériel d’électro-encéphalographie Nicolet.
- Comme il manquait pour 15.000 F de connectique et que nous n’avions plus d’argent, j’ai pris ces 15.000 F sur mon B.Q.R. afin de te permettre de rendre cet équipement opérationnel.
- Nous t’avons doté d’un ordinateur à domicile.
- Nous avons financé, sur les fonds du C.A.G., deux ouvrages - pour l’essentiel des revues de questions - qui t’ont permis de faire figurer ton nom sur une couverture.
- Nous avons financé, sur les fonds du C.A.G. la publication de Kabaro, revue dont [notre collègue X] a constitué le comité de lecture, mais dont tu te présentes comme le bénéficiaire essentiel – dont acte.
- Nous avons fait venir à la Réunion pour des séminaires – et c’était scientifiquement et pédagogiquement justifié – trois de tes collègues [...] de l'université de [...]. C’était aussi pour manifester – et tu sais que j’apprécie personnellement leurs travaux – que nous faisions sa place à la Psychologie et que la pluridisciplinarité que nous affichions n’était pas qu’un vœu pieu. [...]
- Nous avons, dans le même esprit, intégré dans notre Commission de spécialistes plusieurs de tes collègues psychologues, dont, à ma demande, tu as proposé les noms.
- Enfin, tu as bénéficié de crédits de mission pour des programmes que tu as fait exécuter [par des tiers] à Madagascar ou [en métropole].
Voilà pour ce que tu as reçu (je n’ai fait état que de ce qui était vérifiable sur pièce comptable ou autre document administratif) et je ne pense pas que quiconque puisse dire qu’on t’ait mesuré les moyens.

Voyons maintenant la productivité de tout cela :

- L’équipement dont nous avons fait les frais (et dont j’ai fait les frais [sur mes crédits de recherche]) n’a pas été utilisé une seule fois et rouille depuis quatre années dans notre laboratoire. J’ai dû insister pour que tu l’installes (pour sauver au moins les apparences, car cela n’est pas sans se savoir, notamment à la Faculté des Sciences – où il existe pourtant des “perruques”* qui ont coûté autrement plus cher).
- Je me souviens avoir passé un week-end entier à corriger l’un de tes deux ouvrages (ainsi que d’autres relectures qui n’étaient pas, il s’en faut, de pure formalité) : j’en attends toujours le premier remerciement.
- Tu nous as appris ce mercredi que, pour retrouver ta qualification sur la liste des professeurs pour la prochaine campagne, le président du C.N.U. t’avait fait remarquer que ton dossier n’était pas mauvais (merci au C.A.G. qui a subventionné tes publications !) mais qu’il y avait un problème dans la mesure où tu appartenais à un laboratoire d’Anthropologie. Nous avions réglé cette question en changeant l’appellation du laboratoire, la nouvelle rendant plus visible et ce que nous faisons au plan régional et la plurisdisciplinarité de fait que nous tentons de mettre en pratique – sans privilégier une discipline en particulier. Si je comprends bien le sens de ta démission, cela ne te suffit pas, et tu aurais souhaité que l’ethnologie se fasse seppuku pour assurer ta qualification. (Je doute fort qu’un responsable du C.N.U, qui a nécessairement derrière lui une expérience syndicale, ait pu te suggérer une telle action).
Je t’ai donc expliqué :
1° - que ce que je t’aurais accordé dans un environnement scientifique normal, pouvait difficilement l’être quand cela va dans le sens de ceux qui veulent, plus ou moins ouvertement, liquider l’Ethnologie à la Réunion.
2° - et, par ailleurs, que lorsque tu demandes qu’on t’abandonne la responsabilité du labo - notre collègue [X] devant faire, as-tu spécifié, tout le travail (!) – il me paraissait assez aventureux, au vu de tout ce qui précède, de te laisser carte blanche – raison pour laquelle j’ai proposé de coopter [X]...

On pense irrésistiblement à une fable de la Fontaine – où c’est moi, d’ailleurs, “charitable autant que peu sage”, qui jouerait le rôle du naïf. Mais je préfère, après tout, m’être lourdement trompé plutôt que de ne pas t’avoir donné les moyens de faire tes preuves – elles sont faites. En revanche, mon rôle est de défendre les intérêts des Sciences humaines et de l’Ethnologie dans l’esprit de ce que Paul Ottino a créé [...].

Cordialement,


B. C.


*J'englobe sous le terme "perruque", avec ces objets surréalistes produits par l'ouvrier sur son lieu de travail aux dépens de son entreprise, ces matériels de haute technicité qui encombrent les laboratoires et qui n'ont en réalité qu'une fonction décorative.


 RECHERCHER :